« La montagne nous offre le décor. A nous d’inventer l’histoire qui va avec !«
– Nicolas HELMBACHER
« 25 octobre 2022. Le juge des référés du Tribunal de Grenoble annule le lancement des travaux. Sentiment de victoire des militants écologistes de la CluZAD, installée sur le plateau préservé de Beauregard.
Soutenues par de nombreux acteurs régionaux, la communauté scientifique et des habitants, cinq associations avaient saisi le tribunal administratif de Grenoble pour contester l’arrêté préfectoral autorisant le lancement du projet. L’idée ? La création d’une retenue collinaire de 148000⁷ m3 d’eau (soit 10 millions d’euros pour creuser l’équivalent de 5 terrains de football dans la montagne), dont l’objectif principal est d’alimenter en neige artificielle à hauteur de 45% les pistes du domaine skiable de La Clusaz.
Du côté de ce projet climaticide, les promoteurs immobiliers de la région (le coût du m2 à augmenté de 46 % en 5 ans pour atteindre 9490 € le m2), les industriels du BTP, le maire de La Clusaz et le Préfet Laurent Wauquiez. Ils ont mis en avant la nécessaire adaptation dont ils doivent faire preuve face au réchauffement climatique. La région est effectivement largement dépendante des recettes faites lors de la saison hivernale, et de nombreux habitants vivent de cette économie.
De l’autre côté les protecteurs de l’environnement, associatifs et activistes de plusieurs nationalités, dont de nombreuses femmes, installé.e.s depuis un mois sur la tourbière du bois de Colombière.
Déterminé.e.s à sauvegarder cet écosystème à l’équilibre fragile et ses 58 espèces protégées, organisé.e.s avec une bienveillance collective et des règles strictes pour préserver le lieu et le bien être de chaque zadistes, ielles ont fait preuve d’exemplarité, de ténacité et de pédagogie en ouvrant régulièrement leur ZAD aux visiteurs afin d’expliquer leur geste et leurs motivations.
Dans la vallée, la question divise. Bien que nous puissions entendre et comprendre la nécessité de préserver une économie suffisante pour les habitants de la région, cet argument nous semble biaisé et à court termes. En effet, certains professionnels du ski ont peur de leur avenir face à la baisse du manteau neigeux mais ils sont nombreux à prendre conscience que « l‘or Blanc a participé à l’essor économique de la région, mais le modèle d’aménagement d’hier ne peut plus être la réponse aux questions d’aujourd’hui ». En effet, sur le plan environnemental, les autorités arguent le besoin de devoir s’adapter au réchauffement climatique. Or, ce type de projets amplifie la rarification des écoulements naturels des eaux et des rivières, ce qui peut avoir des conséquences dramatiques (nous avons été témoins des phénomènes impressionnants d’inondations aggravées par le manque d’écoulement ou d’infiltration suffisante de l’eau). Sans parler de la dépense colossale en énergie qu’il faudra déployer pour l’acheminement de l’eau. Enfin, le combat est également et évidemment social. Bien que la présence de neige permette la survie de nombreux emplois, l’actuelle politique privilégie l’accès aux logements aux plus riches. Les promoteurs et riches propriétaires s’enrichissent alors que les classes moins aisées n’ont plus la possibilité d’accès à la propriété. Ce qui en découle, à contrario de l’eau, c’est l’augmentation du coût de la vie, qui elle, ruisselle bien sur les habitants. A nouveau, cet exemple illustre bien le lien ténu entre la défense de l’environnement et les enjeux de justice sociale.
Du côté de la ZAD, l’engagement pris de quitter le site et de le rendre aussi propre que lorsqu’ils sont arrivés en une semaine a été tenu.
Leur engagement est également de s’y rendre à nouveau si le pourvoi en cassation déposé par la municipalité (et le préfet) permet le retour des travaux dans quelques mois. Affaire à suivre donc. Nous y serons si besoin».