Nous avons créé le collectif La Faille avec l’envie de photographier à la fois les failles d’un système contre lequel nous militons depuis des années, mais surtout les alternatives qui tentent de redessiner la société. Il s’agit pour nous de prendre le temps de poser nos appareils et d’aller au delà des images, à la rencontre des luttes et des imaginaires que nous souhaitons raconter.
Nous nous sommes lancés dans ce projet d’exposition collective à peine quatre mois après avoir créer le collectif. Il s’agissait pour nous de nous lancer comme groupe, de nous tester, d’apprendre. Difficile en quatre mois de prendre ce temps que nous entendons donner à nos sujets, alors nous avons choisi de raconter certaines des failles sur lesquelles nous travaillons et qui nous touchent. Politiques migratoires contestables, mise à mal des services publics, grands projets inutiles et imposés, actions gouvernementales complètement en deçà des exigences climatiques, discriminations…
Ces thématiques, bien qu’hétéroclites, ont pour nous un point commun : elles sont engendrées par un système oppressif. Cette oppression peut prendre différentes formes, elle peut s’appliquer à différents niveaux et sur des groupes ou des sujets humains ou non-humains. À chaque fois, l’oppression est présente.
Les réactions qu’elle engendre sont multiples et propres à chaque lutte, à ses enjeux et à ses victimes. Elles peuvent par exemple prendre la forme de révoltes, d’occupations de lieux, d’expressions artistiques ou de développement de systèmes alternatifs.
En manifestation la révolte se formalise dans les slogans, sur des pancartes, sur les visages, ainsi que dans certains faces à faces tendus avec les forces de l’ordre, elles-mêmes représentations directes d’une certaine oppression sur le peuple. Dans des mines, la cicatrice laissée dans la Terre est suffisante pour illustrer l’oppression du système extractif sur l’environnement. Concernant les politiques migratoires actuelles, l’oppression se traduit notamment par les protocoles d’éloignement et de régulation des entrées, parfois drastiques : barbelés, barrages, démantèlement de camps, accès difficile à la nourriture.
Nous pensons que, dans chacun des cas, l’oppression ne sert à rien d’autre qu’au maintien du système qui la génère. Si tel est le cas, la société aurait donc plus à perdre à soigner ces maux, qu’à laisser ces inégalités se creuser et les injustices se multiplier.
Il est question projet de société, de vision du vivre ensembles, de la pertinence du choix de gouvernance et prises de décisions actuelles. Nombreux et nombreuses sont celles et ceux qui s’interrogent aujourd’hui sur la construction d’un projet démocratique qui engagerait plus largement la voix de chacun·e, et sur les systèmes de représentation du « peuple ». Des citoyennes et des citoyens lambda ont pris ces questions à bras le corps en tentant de redéfinir localement la société dans laquelle elles et ils souhaitaient vivre. Prenant la forme de brigades de solidarités, de projets culturels en milieux défavorisés, de projets d’habitats collectifs… en plus de tout le vivier associatif incroyable qui œuvre déjà dans le domaine de l’urgence, du social, de l’économie circulaire, du vivre ensemble. En s’émancipant des cadres en places, ces initiatives permettent à la fois d’ouvrir nos imaginaires sur de nouveaux horizons et d’impliquer un maximum de personnes dans la transformation de nos sociétés.
Notre réflexion commence ici, avec cette exposition éponyme qui vous témoigne de ce qui nous anime : le souhait d’observer mais aussi de soutenir certaines luttes et alternatives qui nous semblent œuvrer à la construction d’une société plus juste, équitable et égalitaire. Il ne s’agit pas d’apporter des réponses, mais, au travers de nos travaux, d’être un relai pour rendre compte de la complexité de ces luttes, de l’urgence climatique et de l’importance de se mobiliser ensembles.
Chacun de ces sujets mérite d’être approfondi. Nous espérerons pouvoir le faire, en apportant nos visions à la fois de photographes et d’activistes. Pour cela, rendez-vous sur notre site et sur nos réseaux sociaux !
Belle ironie. Alors qu’une grande partie du personnel hospitalier était en grève depuis des mois pour réclamer des moyens (allant parfois jusqu’à démissionner de leur fonctions administratives ou à s’injecter de l’insuline en réunion), voilà que le pays tout entier compte sur ces hommes et ces femmes pour gérer une crise sanitaire inédite, la pandémie de Covid 19. Inaudibles avant la crise, acclamés pendant, méprisés voire violentés ensuite…
Quelques jours seulement après l’accalmie du mois de mai, la mobilisation a repris de plus belle. Les gestionnaires, les financiers
et les politiques d’austérité ont également fait leur retour. Les soignant•es mènent une lutte pour retrouver la dignité de leur métier depuis plus de deux ans. Deux ans de lutte acharnée et épuisante. Ce sont ces milliers de personnes qui n’en peuvent plus de cette gestion de
crise calamiteuse, d’un système économique, politique et social désastreux. Ce sont ces personnes là que nous avons rencontrées et
photographiées.
Jean Castex déclarait récemment « les hôpitaux sont prêts » : ultime insulte faite à celles et ceux qui étaient dans la rue depuis plus d’un an, qui ont géré une pandémie inédite malgré l’épuisement et sont aujourd’hui toujours dans la même détresse. Non, les hôpitaux ne sont pas prêts, les soignant•es sont à bout et toujours ignoré•es par ce gouvernement qui reste sourd face à leur détresse.
Pour que l’Après ne soit pas pire que l’avant, soutenons les soignant·es, soutenons notre service public. Pour que la santé ne devienne jamais un acte comptable ou une marchandise. Pour qu’elle soit correctement financée, universelle et accessible à tou.te.s.
Historiquement, les politiques publiques migratoires sont relativement récentes. La mobilité, elle, est un phénomène intrinsèquement lié à l’humanité. D’abord une lié à une nécessité de survie, elle s’est modifiée à l’aune de la sédentarisation des peuples. Les notions de territoire puis de conquête se sont donc créées. Et avec elles, la nécessité de se protéger des peuples venant en conquérants. Les premières murailles se sont alors érigées…
La notion de l’étrangeté, elle, a longtemps été liée à quiconque parlant une langue incompréhensible. Elle a eu le temps de se modifier à l’infini, en fonction des relations entre les peuples et des perceptions que chacun•e entretien avec les autres. Aujourd’hui, le terme d’ «étranger» désigne toute personne n’ayant pas la nationalité de l’État dans lequel elle vit. Les conditions de naturalisation française ont évolué au fil du temps, alternant entre le droit du sol, l’adhésion aux coutumes et mœurs du pays, et le droit du sang. Le terme de «nationalité» n’entre d’ailleurs dans le dictionnaire de l’Académie Française qu’en 1835 et sa définition n’a fait qu’évoluer depuis. En effet, avant de désigner l’État Français tel que nous le concevons aujourd’hui, la «Nation» représentait d’abord les personnes qui, dans les institutions internationales, parlaient la même langue.
Après la 1ère guerre mondiale, les pouvoirs publics français vont organiser des recrutements massifs de main-d’œuvre pour reconstruire le pays, en signant des accords avec des pays européens, mais aussi en pratiquant des «recrutements» forcés de travailleurs et soldats venant des colonies.
À cette occasion et dans le but de contrôler ces flux afin qu’ils correspondent à leurs intérêts propres, l’État a été créée la première carte de séjour. Nous étions en avril 1917.
Depuis lors, ces compétences se sont aussi élargies à l’Union Européenne. Ce sont maintenant des arsenaux juridiques de textes, commissions, lois et protocoles comme le traité de Lisbonne, l’espace Schengen, ou le programme de Stockholm, qui définissent le sort des êtres humains, et remettent en cause leur droit inaliénable de fouler un sol unique à tous, la Terre, mais surtout leur droit à la sécurité, à la liberté et à la dignité. Il est nécessaire de comprendre que les lois qui régissent le déplacement de chacun et chacune sur Terre n’ont rien ni de naturel ni d’évident. Il s’agit de constructions sociales qui participent à maintenir un système négligeant les droits de toute une partie de l’humanité.
Ce choix de politique questionne notre idée même de l’Humanité, de la solidarité entre les peuples, et de la Liberté. Nous sommes persuadés que nous devrions opter pour des politiques migratoires plus dignes et plus solidaires, et que la société n’en pâtissera absolument pas.
« Le mur interdit le passage ; la frontière le régule. Dire qu’une frontière qu’elle est une passoire, c’est lui rendre son dû : elle est là pour filtrer. » Régis Debray.
« Cette idée de frontières et de nations me paraît absurde. La seule chose qui peut nous sauver est d’être des citoyens du monde. » Jorge Luis
«En France nous ne sommes pas racistes mais je ne me souviens pas avoir jamais vu un homme noir ministre. Pourtant j’ai cinquante ans, j’en ai vu, des gouvernements. En France nous ne sommes pas racistes mais dans la population carcérale les noirs et les arabes sont surreprésentés. En France nous ne sommes pas racistes mais depuis vingt-cinq ans que je publie des livres j’ai répondu une seule fois aux questions d’un journaliste noir. J’ai été photographiée une seule fois par une femme d’origine algérienne. En France nous ne sommes pas racistes mais la dernière fois qu’on a refusé de me servir en terrasse, j’étais avec un arabe. La dernière fois qu’on m’a demandé mes papiers, j’étais avec un arabe…
La dernière fois que la personne que j’attendais a failli rater le train parce qu’elle se faisait contrôler par la police dans la gare, elle était noire. En France on n’est pas raciste mais pendant le confinement les mères de famille qu’on a vues se faire taser au motif qu’elles n’avaient pas le petit papier par lequel on s’auto-autorisait à sortir étaient des femmes racisées, dans des quartiers populaires. Les blanches, pendant ce temps, on nous a vues faire du jogging et le marché dans le septième arrondissement. En France on n’est pas raciste mais quand on a annoncé que le taux de mortalité en Seine Saint Denis était de 60 fois supérieur à la moyenne nationale, non seulement on n’en a eu un peu rien à foutre mais on s’est permis de dire entre nous « c’est parce qu’ils se confinent mal ». C’est en Seine-Saint-Denis qu’il y a le moins de médecins par habitant de tout le territoire. Ils ont pris le RER tous les jours pour que le travail essentiel à notre vie commune continue d’être assuré. Dans le Centre, c’était «garden-party» tous les jours, en poussette, à vélo, en voiture, à pieds… il ne manquait que les trottinettes. Mais il a fallu qu’on commente : «C’est qu’ils se confinent mal»
J’entends déjà la clameur des twitteurs de service, s’offusquant hargneusement comme ils le font chaque fois qu’on prend la parole
pour dire quelque chose qui ne corresponde pas à la propagande officielle : «quelle horreur, mais pourquoi tant de violence ?»
Comme si la violence ce n’était pas ce qui s’est passé le 19 juillet 2016. Comme si la violence ce n’était pas les frères de Assa Traoré emprisonnés. Ce mardi, je me rends pour la première fois de ma vie à un rassemblement politique de plus de 80 000 personnes organisé par un collectif non blanc. Cette foule n’est pas violente. Ce 2 juin 2020, pour moi, Assa Traoré est Antigone. Mais cette Antigone-là ne se laisse pas enterrer vive après avoir osé dire non. Antigone n’est plus seule. Elle a levé une armée. La foule scande : Justice pour Adama. Ces jeunes savent ce qu’ils disent quand ils disent si tu es noir ou arabe la police te fait peur : ils disent la vérité. Ils disent la vérité et ils demandent la justice. Assa Traore prend le micro et dit à ceux qui sont venus « votre nom est entré dans l’histoire ». Et la foule ne l’acclame pas parce qu’elle est charismatique ou qu’elle est photogénique. La foule l’acclame parce que la cause est juste. Justice pour Adama. Justice pareille pour ceux qui ne sont pas blancs. Et les blancs nous crions ce même mot d’ordre et nous savons que ne pas avoir honte de devoir le crier encore, en 2020, serait une ignominie. La honte, c’est juste le minimum.
Je suis blanche. Je sors tous les jours de chez moi sans prendre mes papiers. Les gens comme moi c’est la carte bleue qu’on remonte chercher quand on l’a oubliée. La ville me dit tu es ici chez toi. Une blanche comme moi hors pandémie circule dans cette ville sans même remarquer où sont les policiers. Et je sais que s’ils sont trois à s’assoir sur mon dos jusqu’à m’asphyxier – au seul motif que j’ai essayé d’esquiver un contrôle de routine – on en fera toute une affaire. Je suis née blanche comme d’autres sont nés hommes. Le problème n’est pas de se signaler « mais moi je n’ai jamais tué personne » comme ils disent « mais moi je ne suis pas un violeur ». Car le privilège, c’est avoir le choix d’y penser, ou pas. Je ne peux pas oublier que je suis une femme. Mais je peux oublier que je suis blanche. Ça, c’est être blanche. Y penser, ou ne pas y penser, selon l’humeur. En France, nous ne sommes pas racistes mais je ne connais pas une seule personne noire ou arabe qui ait ce choix»
L’Allemagne s’est engagée à stopper toute production d’énergie nucléaire à l’horizon fin 2022. Pour palier aux besoins croissants de son industrie, elle utilise le charbon qu’elle extrait de ses propres mines : la lignite, qui est un charbon de très basse qualité. Ces mines sont à ciel ouvert, la surface du sol est rasée et creusée, engloutissant tout ce qui va avec, villages, forêts, routes… pour extraire la matière située quelques dizaines de mètres sous la surface de la terre. La moitié de l’énergie produite sert au fonctionnement des mines. Il existe deux zones d’extraction, l’une en Rhénanie près de Cologne et l’autre en Lausitz à proximité de la frontière polonaise…
Depuis 2015, chaque année, les militants écolo d’Allemagne et de toute l’Europe viennent se battre contre ce système infernal, en organisant les plus grandes actions de désobéissance civile de masse qu’il soit. Des actions comptant jusqu’à 6000 personnes, bloquant le fonctionnement des mines, l’acheminement du charbon par rail vers les centrales situées à proximité voire les centrales électriques directement.
L’organisation de ces actions est aujourd’hui bien rodée et sert de référence et de modèle pour les mouvements écologistes radicaux à travers le reste de l’Europe et du monde.
Un « consensus » d’action définit les limites de l’engagement du groupe, les principes de base étant : pas de violence physique ni verbale, pas d’atteinte aux personne ni de dégradations matérielles. Ces recommandations sont bien sûr laissées à la libre appréciation de chacun-e en fonction du contexte évolutif pendant l’action.
Depuis cinq ans que ces rassemblements existent, les mines sont toujours en fonctionnement. Les villages et les forêts situés sur la veine de charbon, comme la forêt de Hambach, continuent à être détruit.es et disparaissent du paysage. La mise à l’arrêt de cette mine dévoreuse n’est pas prévue avant plusieurs années.
Concrètement ces actions de blocages entrainent l’arrêt du fonctionnement de la mine pendant tout au plus quelques jours. Mais Ende Gelände est devenue le symbole, le modèle de contestation qui a permis de lancer une dynamique d’actions au niveau européen, axée sur des rencontres et des méthodes partagées entre militant·es français·e, anglais·e, italien·nes, allemand·es…
Lisle sur Tarn (81), octobre 2014. Depuis la mi-septembre la zone humide du Testet est défrichée en vue de la construction d’une retenue d’eau sur le Tescou visant à répondre aux problèmes de sécheresse auxquels les agriculteurs et agricultrices de la région font face de plus en plus régulièrement. Depuis son lancement, le projet est très controversé. Destruction de la dernière zone humide du versant, projet coûteux et inadapté, le tout au profit d’un modèle agricole «sans issue» pour les agriculteurs, agricultrices et la société dans son ensemble…
Les arguments des opposant·es sont nombreux mais n’ont pas suffit pour convaincre. En décembre 2013, le tribunal administratif rejette définitivement tous les recours déposés. Le collectif «Tant qu’il y aura des bouilles», qui occupe le terrain depuis octobre 2013 devient alors la dernière barrière au projet. Expulsé plusieurs fois, les militant·es reviennent toujours mais sont maintenu·es à distance des travaux par les forces de l’ordre.
Le week-end du 25 et 26 octobre un grand rassemblement festif est organisé sur la « Zone A Défendre » (ZAD). Environ 2000 personnes, dont des têtes d’affiche tels que José Bové ou Jean-Luc Mélenchon, sont réunies autour de conférences, débats, concerts… Une marche est organisée sur la zone de travaux, vidée des engins de chantier. En fin d’après-midi, alors que des militant·es pacifiques sont encore sur la zone, la situation se tend et des affrontements éclatent entre un groupe de militant·es anarchistes et les forces de l’ordre présentes sur place.
Aux alentours de 2h00 du matin, le dimanche 26 octobre, une grenade offensive atteint Rémi Fraisse, un militant non-violent, venu sur la ZAD à l’occasion du rassemblement. Il meurt sur le coup. L’autopsie confirmera que l’explosion d’une grenade offensive dans son dos est la cause du décès.
Le projet initial sera abandonné définitivement en décembre 2015. En juillet 2016 le tribunal administratif de Toulouse annulera les trois arrêtés fondateurs du projet et notamment la déclaration d’utilité publique. L’État financera la réhabilitation du site visant à lui restituer son état d’avant les travaux en remettant notamment en place la terre qui avait été déplacée. Diverses enquêtes sont ouvertes suite au décès de Rémi Fraisse. Les enquêtes et procédures judiciaires visant les gendarmes impliqués, le préfet de police en charge et son chef de cabinet se concluront, après plusieurs renvois en cassation, par un non-lieu.
Cette série est extraite d’un reportage à paraître, revenant sur les évènements de cette semaine tragique d’octobre 2014 et des mobilisations qui ont suivi à Paris. Suivez nous pour avoir la suite !
Dimanche 13 septembre 2020. Nouvel épisode caniculaire en vue (34° à Paris, 38° à Bordeaux). Les bars vont remplir leurs terrasses, les plages déverser leur huile solaire dans la mer, les climatisations tourner. Pendant ce temps Gaïa s’emballe fiévreusement. Gaïa brûle en Amazonie, en Californie, en Sibérie. Les pôles fondent, les océans se vident, victimes de pollutions et de l’activité humaine dans son ensemble…
Mardi 13 septembre 2050. Un épisode caniculaire pourrait, selon le scenario « laisser faire » du GIEC, pousser les thermomètres parisien au dessus de 44°.
Pourtant les cris d’alarme ne datent pas d’hier. Al Gore nous avait déjà refroidi en 2006 avec «Une vérité qui dérange», film clairvoyant basé sur des paroles d’experts scientifiques. Nicolas Hulot avait renchéri avec son «pacte écologique», et nous avait mis en garde sur les risques de famines, de guerres civiles et de migrations forcées par le réchauffements planétaires.
Malgré les Accords de Paris signés à la COP21, aucun État n’a pris acte de l’urgence d’agir. Nicolas Hulot a démissionné en aout 2018 du poste de Ministre d’État à la Transition Écologique et Solidaire et déclenchera une mobilisation sans précédent des jeunes générations. La pétition «L’affaire du siècle» recueillera 2 millions de signataires, record jamais battu à ce jour.
Sur chaque continent la jeunesse s’est emparé du sujet. Greta Thunberg est devenue l’icône du mouvement. Youth 4 Climate, Extinction Rebelilon ont rejoint les ONG et mouvement historiques comme Greenpeace, Alternatiba, ANV-COP21, L214, etc.
Les manifestations « légales » se sont multipliés mais se sont avérées insuffisantes pour faire bouger les lignes. Les actes de désobéissance civile et non violente, directement au pied des institutions ou des entreprises peu scrupuleuses, n’ont pas suffi. En réponse, le gouvernement a déployé un arsenal de plus en plus répressif et de nombreux activistes se sont retrouvés assignés en justice.
L’enjeu écologique, intimement lié à l’ensemble des luttes sociales, a davantage pesé sur les pays les plus pauvres et les classes sociales les plus démunies.
Quelle histoire voulons-nous réellement raconter en 2050 ?
« Hausse des bénévoles dans les associations, mobilisation individuelle ou collective pour aider un voisin à faire ses courses ou fabriquer des masques de protection : cette crise, comme d’autres avant elle, a suscité une « insurrection de la bonté ». » Publié le 17 avril 2020 dans le Monde par Jessica Gourdon.
Bien sûr que comme dans toute crise, il y eu aussi des échecs, des individualités, des incivilités, des inégalités, des drames. Mais elle a aussi suscité des élans de générosités, et a créé un espace où chacun a pu se demander quelle place il pouvait avoir dans tout cela. Quel sens il donnait à son temps, à ses activités. S’il connaissait finalement ses voisins ? Son quartier ? Des groupes Facebook se sont créés, des mots sur les portes, des anonymes cousant des masques, d’autres envoyant des cookies à des équipes hospitalières… Nous avons vu des reportages sur certaines de ces initiatives, les plus visibles souvent, mais, rien n’a été plus touchant que de la percevoir à sa porte, à son balcon, au coin de sa rue.
Le 1er mai, jour de la Fête du Travail, chamboulée par le confinement, j’ai choisi de suivre ceux qui œuvraient à ma porte, dans ma ville, à vrai dire, à 100 mètres de chez moi. Il y avait là l’association En Action. Des Nogentais qui s’organisaient par eux-mêmes pour identifier les familles en difficulté, et leur proposer une aide alimentaire. La débrouille. Le bouche-à-oreille. Les bons plans, les commerçants généreux. Je les ai suivis une après-midi, afin de garder une trace, de témoigner, de leur dire merci. En partant déposer des cageots dans des hôtels sociaux et foyers d’accueil, nous sommes passés devant un barnum. Avec d’autres cageots, des boîtes de conserves, des légumes, quelques jouets, des sourires. A Fontenay-sous-Bois, il y avait aussi la même solidarité, la même envie d’être utiles. Il y avait là des bénévoles de l’association l’Effet Cairn, et de la Brigade de solidarité populaire, née pendant le confinement. Au fond des cageots, des questions, que soulèvent ces brigades qui se sont créées en Italie puis se sont essaimées : le sens ou l’obsolescence d’un Etat Providence, l’auto-organisation, une base territoriale. Accusant clairement les gouvernements et les politiques néo-libérales, les brigades de solidarité populaire affirment nous ne pouvons pas tout attendre de l’Etat. Mieux, elles appellent à des créations d’organisations collectives et de générer des solidarités concrètes.
Puis, le flot du quotidien a repris, bouillonnant. Les cageots ont été rangés dans des locaux poussiéreux. Les bénévoles ont déserté. Ils ont dévissé direction l’entreprise. Agglutinés dans le métro. Bloqués dans leur voiture. Rien n’a finalement changé ? Retour finalement à « l’anormal » ? Toutes ces bonnes résolutions jurées crachées, au goût pétillant de réveillon, noyées dans les flûtes de champagnes, enfin oubliées au fond des placards dans les boîtes à verres à pied. Peut-être. Ou bien. Cela a secoué. Cela a fait germer des idées. Des interrogations. Sur le sens de sa vie, sur sa place dans la société, sur l’éducation que nous voulons pour nos enfants. Sur ce temps après lequel nous courrons, en oubliant l’essentiel. Des envies. De partages plus sincères. De préserver la planète. De s’ouvrir à ses voisins. De s’impliquer dans son quartier. Aujourd’hui nous n’applaudissons plus aux balcons alors que les personnels soignants suent encore, sans grande revalorisation. Rien n’a globalement vraiment changé. Mais quand je sors sur mon balcon, et que je croise mes voisins du regard, maintenant, on se reconnaît, on se sourit, on se salue. Vous n’avez besoin de rien ? Et ça , peut être que ça change tout.
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